Shadow of the Colossus : une “troisième” jeunesse

Mieux vaut tard que jamais, c’est bien ce qu’on dit non ? 12 ans c’est quoi finalement, 2 générations de console ? Qu’importe le retard, ce second remake de Shadow of the Colossus était pour moi une opportunité en or pour enfin poser les mains sur le chef d’oeuvre de Fumito Ueda, du moins sur une copie revue en profondeur par les équipes de Bluepoint Games. Alors, travail bâclé ou véritable hommage ?
Comme à mon habitude, j’ai fait les choses à l’envers en découvrant l’artiste au travers de son seul “faux pas”, le bien nommé The Last Guardian testé ici-même. Après avoir eu vent de l’épopé que représentait Shadow of the Colossus pour bien des joueurs, je suis rentré dans l’aventure avec l’espoir sincère d’en sortir changé.
Les premières minutes de jeu derrière moi, j’ai vite compris qu’il ne s’agissait pas de n’importe quelle production. On y fait la connaissance d’un jeune guerrier, contraint de se rendre dans des terres interdites pour y sauver une jeune femme répondant au doux nom de Mono. On nous explique alors que 16 colosses nous séparent de notre objectif. La particularité vient du fait que vous ne croiserez le chemin que de ces colosses, aucune autre menace à l’horizon. C’est en ça notamment que Shadow of the Colossus se veut différent.

Les étendues sont telles qu’on vous offre d’entrée la possibilité d’enfourcher Agro, votre fidèle destrier qui mesure trois fois votre taille. C’est après quelques galops qu’on mesure la beauté du vide offert par le jeu : des terres désolées qui renferment des forêts luxuriantes, des plaines à perte de vue, des lacs à l’ambiance pesante ou encore des déserts arides sublimés par les artistes de Bluepoint. Au risque de me faire taper sur les doigts par certains, j’oserais presque la comparaison avec un certain Zelda : Breath of the Wild. Le silence constant et l’absence de toute menace laisse place à la contemplation, appuyant un peu plus le poids de chacun de vos actes.
Je n’ai pu me fier qu’à des vidéos comparatives mais force est de constater que le travail abattu par les équipes de Bluepoint Games est remarquable ! Bien plus frappant que ce à quoi nous avait proposé la version remastérisée de 2011.
Le studio est reparti d’une feuille blanche en matière de graphisme, retravaillant ainsi chaque asset ! Ceci sans dénaturer la direction artistique posée par Fumito Ueda qui reste encore aujourd’hui un modèle dans le milieu.
Après des arrêts répétés à contempler le panorama, le joueur est vite rattrapé par sa quête qui l’emmène toujours au “pied” des colosses. Chacune de leur apparition nous fait retenir notre respiration et demander comment un jeune guerrier pourvu d’une simple épée pourrait bien les faire tomber. Leur grandeur couplé au silence régnant laisse littéralement sans voix. Chacun des colosses possèdent ses attributs et ses animations propres plus léchées les une que les autres. Les colosses tiennent indéniablement une place centrale dans Shadow of the Colossus et son écriture.

Les premiers colosses m’ont valu quelques énervements me laissant penser que j’étais en désaccord complet sur les commandes/calibrage donnés aux jeux de Fumito Ueda (relatif au test de The Last Guardian).
Dans Shadow of the Colossus, vous passerez par trois grandes phases avant d’espérer faire trembler le sol par la chute d’un colosse.
Ces dernières, que sont l’observation, la grimpe et l’exécution, s’enchaînent naturellement et varient en fonction de l’environnement dans lequel évolue le colosse.
Si on les prend indépendamment, on observe en premier lieu le design de la créature pour comprendre comment monter dessus. Pour ce faire, il faudra parfois ruser, parfois jouer de son environnement ou même trouver le bon timing pour espérer l’atteindre. S’ensuit la grimpe mêlant plateforming, réflexes et tenacité. C’est sur celle-ci que je me suis arraché mes derniers cheveux. Pour atteindre les points faibles du colosse, il faudra vous accrocher fermement à ces poils dès lors que ce dernier cherchera à vous envoyer bouler dans le décor en gesticulant à tout-va. C’est le timing de pression sur la touche pour s’agripper/bondir qui m’a décontenancé car jamais vu auparavant, couplé à une gestion de caméra qui peut se montrer capricieuse par moment. Bref, j’ai pris un peu de temps avant de réussir à gambader sereinement sur le dos des colosses. C’est d’autant plus frustrant car il est nécessaire de gérer l’endurance de votre personnage qui s’essouffle rapidement. Si le manque d’endurance se fait ressentir alors vous lacherez prise et devrez donc reprendre depuis le sol, à moins de gérer habilement vos temps de pause. Tout cela donne lieu à des instants de jeu épiques jusqu’au dernier coup d’épée qui laissera place à une cutscene majestueuse où le colosse rend l’âme. Ces affrontements sont d’une intensité rare et portés par une bande originale épique composée par Kow Otani. Il m’est difficile de décrire le sentiment de satisfaction, dans certains cas il faut simplement le vivre par soi-même. Le plus étrange sans doute, c’est d’avoir pleuré la disparition de créatures magnifiques, c’est dire la charge émotionnelle que les colosses procurent…
Pour le reste, Shadow of the Colossus vous occupera une dizaine d’heures si vous tenez à mettre la main sur tous les lézards pour booster votre barre d’endurance et des fruits pour votre vie. En dehors de ça, ne vous attendez à rien d’autre que des balades pédestres cheveux au vent. Les joueurs ayant déjà bouclé l’aventure n’auront que le plaisir de redécouvrir un jeu plus beau et surtout plus fluide avec du 60fps sur PS4 Pro. Pour les plus artistes d’entre nous, un mode photo super complet s’est greffé au jeu, de quoi immortaliser votre aventure.
Comme je le disais en début de test, je ne remercierais jamais assez Sony d’avoir pris la peine de rééditer une seconde fois Shadow of the Colossus qui se classe parmi les expériences les plus insolites de ma vie de joueur. Artistiquement époustouflant et sublimé par un travail de remasterisation soigné, il offre des combats dantesques soutenus par une BO incroyable. Un grand jeu pour un petit prix, que demande le peuple.