Test de The Last of Us Part I : le remake de trop ?

Test de The Last of Us Part I : le remake de trop ?

Voilà 10 ans que j’ai été marqué par les aventures de Joel et Ellie. 10 ans c’est à la fois long mais pas assez pour parler à mon sens de jeu d’époque. Là où les remakes de Resident Evil 2 et 3 se justifiaient sans trop de problème, Naughty Dog a décidé de dépoussiérer The Last of Us premier du nom pour coller davantage à l’expérience visuelle offerte par The Last of Us Part II. Deux années de boulot pour tomber ce remaster (remake ?) qui a trouvé le chemin de ma PS5 sans trop de problème…

Doit-on vraiment présenter The Last of Us ? Cette nouvelle franchise aura permis à Naughty Dog de prouver que le succès d’Uncharted n’était pas un coup du hasard. Le studio californien s’est évertué à nous proposer une expérience de jeu plus adulte, plus émotionnelle et d’après moi encore plus marquante que celle d’un certain Nathan Drake, dont je suis le premier fan au demeurant.
On doit notamment ce coup de génie à Neil Druckmann qui, depuis lors, n’a cessé de monter en grade jusqu’à prendre la co-direction du studio. Pleinement investi dans le développement de cette nouvelle franchise, au point de réaliser plusieurs épisodes de la série TV éponyme, Neil reste un homme et ne peut pas encore se subdiviser. Actuellement en train de plancher sur une nouvelle IP fantastico-médiéval en fuite depuis un peu plus d’un an, il a confié le projet The Last of Us Part I a deux gars solides : Matthew Gallant, game director et Shaun Escayg, directeur créatif. Ce choix n’est pas anodin, vous vous en doutez. Matthew a eu un rôle clé sur The Last of Us Part II avec notamment la co-création de la soixantaine de fonctionnalités d’accessibilité qui ont fait tant parler à la sortie du jeu. Quant à Shaun, on lui doit l’animation des cinématiques sur The Last of Us et Uncharted 4, rien que ça. Le projet était donc entre de bonnes mains.

Rappelons que The Last of Us n’en est pas à sa première remasterisation. En 2014, soit un an après sa sortie, le jeu profitait de l’arrivée de la PS4 pour ressortir. Alors comment justifier une troisième sortie au-delà du fait que la génération de console ait aussi été renouvelée ?
En se donnant les moyens ma bonne dame. On reprend les fondations du jeu, on les étudie et on détermine là où l’on veut mettre l’effort. "Rebuilt from the ground up" a été l’expression employée dans la campagne marketing du jeu. On pourrait penser à une pub mais ce serait mal connaître Naughty Dog. Les personnages, leurs visages qui, pour certains, ont carrément été revus, sont la plus belle vitrine de ce Part I. Les animations faciales déjà saisissantes pour l’époque gagnent encore plus en réalisme. La synchro labiale est elle aussi affinée pour donner encore plus d’intensité aux dialogues. Le mode photo est là pour l’attester !
Sans être bouleversantes, les nouvelles animations introduites apportent plus de fluidité et donc, là encore, renforce le réalisme. C’est la techno déployée dans The Last of Us Part II qui est à l'œuvre : le Motion Matching. Ça consiste grosso modo à laisser un algorithme lier les animations entre elles. Ce dernier va piocher parmi une sélection de mouvements dans une base de données et va les exécuter en même temps pour rendre à l’écran le mouvement le plus naturel qui soit. C’est subtil mais perceptible dans ce Part I.

Les environnements ne sont pas en reste puisqu'ils gagnent eux aussi en densité, en détails et même, pour certains, de nouvelles retouches. Bien sûr les fans de la première heure retrouveront leurs marques malgré l’apparition de nouveaux objets ici et là nous encourageant à fouiller le moindre recoin. J’ai même vu après-coup qu’un easter egg en référence à l’incroyable série The Office (US) avait été intégré...
Côté technique, là encore le travail est soigné avec des éclairages qui viennent renforcer l’ambiance générale. Les ombres sont plus nettes et plus marquées. PS5 oblige, les développeurs n'ont pas dû hésiter longtemps à intégrer de nouveaux effets volumétriques pour les spores ou encore les explosions. Même la neige en fin de jeu rappelle directement celle de The Last of Us Part II. Pour les fanatiques du Ray-Tracing, vous pourrez admirer le visage de Joel dans chaque miroir et autres flaques. Ce n'est pas une surprise en 2022 mais ça vient policher un jeu déjà en avance sur son temps en 2013.
Comme bien souvent désormais, deux modes sont proposés : Fidélité ou Performance. J’ai pour habitude de favoriser les 60 FPS d’autant que pour The Last of Us Part I, la 4K dynamique est tellement proche de la native que ce serait dommage de se priver du gain de fluidité offert par les 60 FPS.

Avec un tel effort porté sur le visuel, on imaginait que le gameplay recevrait quelques chouettes améliorations. Pour ne rien vous cacher et malgré le discours tenu par Naughty Dog à ce sujet, les sensations restent inchangées. Rien de critique en soit mais un certain The Last of Us part II est sorti entre temps avec son lot de nouveautés (je pense à l’esquive en particulier). Naturellement, on espérait en bénéficier sur Part I mais il faut croire que le défi technique était trop important. On garde donc cette rigidité dans les déplacements de Joel : lent et un peu lourd manette en main.
Même chose dans le comportement des ennemis qui ne profitent pas plus du moteur d’IA de The Last of Us Part II qui, pourtant, avait réussi à me surprendre à plusieurs reprises. Sans être complètement bête, les patterns sont facilement identifiables et on peut se retrouver parfois à quelques centimètres des ennemis sans être inquiété. Dommage mais prévisible, des compromis ont dû être faits et l’objectif n’était clairement pas de “réécrire” tout le jeu.

On terminera sur une note plus que positive : l’accessibilité. À l'instar de The Last of Us Part II, TLoU Part I regorge d'options d’accessibilité. Je ne vais pas me risquer à toutes les lister ici mais forcé de constater que le spectre couvert est très, très large : préréglages d’accessibilité (visuelle, auditive et motrice), commandes alternatives qui permettent d’appuyer plutôt que de maintenir ou inversement, agrandissement et aides visuelles, cinétose (réglage des tremblements de la caméra, du flou cinétique, de la distance de la caméra embarquée et même du champ de vision), de nouvelles façons pour les joueurs malvoyants et non voyants de naviguer dans l’univers, un large choix de personnalisation des sous-titres… et j’en passe. L’objectif était clair : permettre à tout à chacun de vivre dans les (ses) meilleures conditions cette aventure.
La DualSense joue également un rôle prépondérant avec ses retours haptiques et ses gâchettes adaptatives. Elle renforce l’immersion notamment lors de phases d’action où chaque coup donné est plus ressenti que jamais !

Avec tout ce que j’ai pu évoquer, difficile de ne pas parler de remake. Le travail abattu sur The Last of Us Part I est impressionnant même si toujours moins important que d'autres remakes, sans doute car le jeu d’origine n’a “que” 10 ans.
L’aventure proposée n’a pas pris une ride, on vit des choses folles aux côtés de Joel et Ellie, ça restera intemporel à mes yeux.Reste la question du prix qui a beaucoup fait parler, à raison. On parle du prix fort, 80 €, conseillé par Sony lui-même à la distribution. Bien entendu, vous n’aurez pas à chercher bien longtemps pour trouver The Last of Us Part I dans les 60 €. Non, ce remake ne pouvait être proposé pour autant comme une simple upgrade à 10 €, comme on l’a déjà vu.
Je pense que ce Part I s’adresse avant tout à ceux qui auraient joué en 2013 à sa sortie d’origine et bien entendu à ceux qui ne s’y seraient jamais essayés (shame on you mais je vous envie aujourd’hui). Ce nouvel “emballage” est aussi la volonté d’après moi de réduire l’écart psychologique entre Part I et Part II (leurs titres parlent d’eux-mêmes), de telle sorte à les percevoir comme un seul et même jeu. Cela serait-il annonciateur d’une Part III ? On est beaucoup à en rêver.

Note : 5/5